On a longtemps cru que l’ancêtre de notre chat domestique était le felis silvestris silvestris, le chat sauvage d’Europe. Les dernières études génétiques (2007) ont remis en cause cette croyance et confirmé que le felis silvestris catus descendait en réalité de la sous-espèce felis silvestris lybica, le chat ganté d’Afrique.

Les premières découvertes paléontologiques situaient les premiers foyers de domestication du chat en Égypte, vers 2000 av. J.-C., mais la découverte en 2004 par une équipe du CNRS dirigée par Jean Guilaine des restes d’un chat aux côtés de ceux d’un humain dans une sépulture du village néolithique de Shillourokambos sur l’île de Chypre repousse le début de cette relation entre 7 500 à 7 000 ans av. J.-C. 

Le chat découvert présente une morphologie très proche du chat sauvage d’Afrique, sans les modifications du squelette dues à la domestication : il s’agissait d’un chat apprivoisé plutôt que domestiqué.

Un être humain et un chat ont été enterrés côte à côte.

Ceci indique une association très forte entre l’homme et l’animal, peut-être la trace du premier chat qui a partagé sa vie avec un humain.

Chypre est une île distante de 60 à 80 km du continent depuis sa formation. Il n’y a aucune preuve qui ait été trouvée que des félidés aient été présents sur l’île au départ. L’introduction du chat dans l’île est donc due à une action de l’homme.

Des preuves ?

Une preuve formelle d’une domestication du chat n’a pas été trouvée. Néanmoins, les hommes du mésolithique tardif et du néolithique ont introduit des animaux sur d’autres îles. De même, le renard a été introduit sur Chypre à peu près à la même époque.

Qu’a-t-on trouvé lors des fouilles ?

Shillourokambos était un village néolithique habité de la fin du 9e à la fin du 7e millénaire av. J.-C. Les bâtiments ont été mal conservés, mais des milliers d’objets en pierre et en os ont été découverts. C’est sur ce site qu’on a retrouvé des restes d’un humain âgé d’au moins 30 ans et, à moins de 40 cm, celui relativement complet d’un chat (Felis silvestris lybica), dans la même couche de sédiment. Homme et chat étaient enterrés selon la même orientation.

Les analyses ont montré que le chat était âgé d’env. 8 mois — jeune mais déjà de taille adulte — et daterait d’entre 7500 à 7000 ans avant notre ère. Vu sa grande taille, on pense qu’il s’agissait d’un mâle.

L’humain a été enterré avec des outils, de la pierre polie, de l’ocre et une petite fosse contenant 24 coquillages marins ; ce qui est bien davantage que ce qui a été trouvé dans d’autres tombes proches. Ceci laisse à penser que cet homme avait un statut social particulier et une relation spéciale avec les chats.

Que peut-on en conclure ?

La cohabitation des chats et des êtres humains est probablement arrivée avec le début de l’agriculture : le stockage du grain a attiré les souris et les rats, qui ont attiré les chats, leurs prédateurs naturels . Alors que l’on pensait que la domestication du chat avait commencé avec l’agriculture, ces fouilles archéologiques ont mis en lumière un début de rapprochement bien plus ancien.

De plus, on peut légitimement penser que la domestication a en réalité eu lieu simultanément au sein de plusieurs foyers géographiques.

Des preuves archéologiques directes d’une relation commensale entre les éleveurs de mil et les petits félidés se nourrissant dans le réseau trophique humain ont été documentées à Quanhucan en Chine (∼5 560 à 5 280 ans), où les chats léopards (Prionailurus bengalensis) ont chassé des rongeurs dans un village agricole et pourraient même avoir été nourris. Cependant, cette relation n’a pas conduit à une domestication complète.

Les restes de chats de Pologne datés de 4 200 à 2 300 ans avant notre ère sont actuellement les premières preuves de la migration du chat sauvage du Proche-Orient vers l’Europe centrale. L’étude de la paléodiète révèle que l’équilibre écologique de ces chats était déjà modifié en raison de l’expansion des terres agricoles néolithiques. Les auteurs de l’étude concluent que parmi les chats sauvages du Proche-Orient néolithique tardif de Pologne se trouvaient des individus vivant en liberté, qui se nourrissaient de rongeurs nuisibles et partageaient des niches écologiques avec des chats sauvages européens indigènes.

Le chat domestique n’est pas la seule espèce parmi les félins utilisée comme animal de compagnie, le chat ganté et le Jaguarondi sont ou ont été apprivoisés eux aussi pour chasser les souris et les rats.

Felis silvestris catus a ensuite colonisé le monde entier, notamment avec l’avènement des voyages maritimes, transporté à bord de nos bateaux pour lutter là aussi contre les rongeurs… jusqu’à devenir l’animal-compagnon qui remplit aujourd’hui avec bonheur des millions de foyers !

Commensalisme

Association d’organismes d’espèces différentes, profitable pour l’un d’eux et sans danger pour l’autre

Sources

VIGNE, J.-D., GUILAINE, J., DEBUE, K. [et al.], Early Taming of the Cat in Cyprus, Science, vol. 304 / 5668, avril 2004, p. 259‑259

Science Magazine : Early Taming [En ligne : http://www.sciencemag.org/content/304/5668/259.full.pdf]