Ou le Maitre-chien devenu comportementaliste félin …

Maitre-Chien au 132e Groupement Cynophile de l’Armée de Terre à Suippes, j’ai complété mon Brevet Elémentaire en passant l’ACACED option chien 2020/ b3ce-72ec qui m’a permis d’aborder toutes les problématiques que les humains peuvent rencontrer avec leur chien. J’ai ensuite approfondi ces connaissances en suivant la formation cohabitation chien-chat {Canidelite / Educhateur} animée par Sandie DECORTIAT & Chloé FESCH.

Le fait d’avoir étudié en détail le comportement du chien, ses besoins spécifiques, sa communication, représente un atout dans le cadre de mon métier de comportementaliste félin.

Je peux ainsi porter un regard complet et pertinent dans les cas de relations compliquées entre ces deux espèces très différentes.

L’élément majeur qui différencie les chiens et les chats est d’abord lié à leur nature : le chat est une espèce solitaire (sauf lorsque des chats harets se rassemblent autour de points de nourriture, et s’assemblent en groupes grégaires, en matriarcats), tandis que le chien est lui une espèce sociale, et à l’image du loup peut vivre en groupe organisé.

 

 

On entend souvent dire : Les chiens et les chats ne s’entendent pas

En fait : Ils ne se comprennent pas …et certains de leurs comportements n’ont pas le même sens

 

Leurs codes de communication sont différents, et les postures et mimiques de chacun parfois difficilement interprétables par l’autre espèce. Par exemple, alors que la queue qui remue est chez le chat un signe d’inconfort, de nervosité, voire un signal de mise à distance quand elle se balance fortement et claque le sol, chez le chien, ce même geste est le plus souvent un signe de bien-être, d’excitation positive. Cela peut ainsi créer des malentendus qui, à répétition, mènent parfois à des conflits.

Un chien qui avance la patte antérieure vers une personne ou un autre animal, le fera pour jouer … un chat qui lève la patte défie son éventuel agresseur et est prêt à frapper.

Il y a une différence de signification de la posture « couchée sur le dos » : il s’agit de soumission en cas de conflit chez le chien, en revanche, il s’agit d’une sortie de toutes les armes chez le chat qui prend une posture de défense extrême. Le chat peut s’approcher du chien en soumission mais la réciproque n’est pas vraie ; si le chien s’approche du chat couché sur le dos toutes armes dehors, il se fera griffer et mordre.

Une autre différence essentielle réside dans la perception et l’occupation de l’espace : alors que le chien évolue au sol, le chat perçoit son environnement en trois dimensions.

Pour une cohabitation chat-chien optimale, les espaces en hauteur joueront donc un rôle clé pour permettre à chacun de trouver sa place, et offrir au chat des lieux sécurisés pour observer, se reposer, se cacher. Dans la nature, le chien fait naturellement partie des prédateurs potentiels pour le chat, le réflexe premier de ce dernier en cas de peur sera donc de de fuir et s’échapper dans des lieux inaccessibles.

 

 

L’iconographie actuelle illustre la représentation de la relation entre chiens et chats. Aujourd’hui, chiens et chats s’adorent, ils dorment ensemble, enlacés, se frottent l’un à l’autre. C’est l’image de la paix, de l’entente, de l’amour fraternel.

La cohabitation entre les deux espèces est non seulement possible mais des liens très forts peuvent bien sûr se créer entre chiens et chats :

– mon Berger Allemand et le siamois de ma mère avaient tissé de réels liens d’amitié, le chat devenu aveugle se promenait dans le jardin tous les matins avec le chien qui lui servait de guide.

Comme pour toute cohabitation, les conditions de développement précoce et le tempérament de chaque individu joueront un rôle déterminant. La familiarisation à l’autre espèce pendant la période juvénile et les expériences positives potentiellement associées favoriseront d’emblée une meilleure adaptation. Un chaton ayant grandi avec des chiens autour de lui dans de bonnes conditions sera en effet plus apte à cohabiter avec un chien, et inversement.

Pour une bonne imprégnation, il faut des contacts étroits, voire des interactions de jeu. Le chaton peut aisément se socialiser aux chiens … d’un certain type.

A l’image de l’imprégnation à l’espèce humaine, l’imprégnation à l’espèce canine est partielle, de qualité variable, s’oublie avec le temps et est rarement généralisable à l’espèce.

Le chat apprend que le chien auquel il a été imprégné est son familier, mais il lui faut des contacts avec d’autres chiens d’autres types pour reconnaître cognitivement l’espèce canine comme étant une espèce familière digne de contact social affectueux.

Si le chat est socialisé à plusieurs types de chiens et qu’il généralise à l’espèce canine, il risque de ne plus éviter les chiens inconnus qui, s’ils ne sont pas socialisés aux chats, risquent de le poursuivre et de le tuer.

C’est le protocole de présentation, l’aménagement de l’espace et des ressources et la gestion des interactions qui contribueront à favoriser une bonne cohabitation.

Pour que cette cohabitation se passe bien, il sera essentiel de bien connaitre les besoins des protagonistes (répartition des ressources et aménagement de l’espace : nourriture / bac à litière / lieu d’isolement en hauteur …) et prendre en considération la personnalité de chacun.

Il faudra être patient, bienveillant et ne pas précipiter les présentations : le temps et la compréhension seront les maîtres mots pour que tout se passe pour le mieux.

Enfin, mettre les animaux en situation de réussite ne pourra que valider les bons comportements et faciliter la tâche des humains. Il faudra positiver les approches de l’un et de l’autre, afin de renforcer les liens pour leur futur commun.

 

Ce sont toutes ces questions que j’aborderai dans le cadre d’un bilan comportemental ayant pour but d’intégrer un nouveau chien ou un nouveau chat dans une famille déjà composée de chiens ou de chats.

La prévention est la clé de la réussite : la cohabitation se passera d’autant mieux si tout a été abordé en amont de l’introduction du nouvel animal.

 

Le chien et le chat sont des ennemis symboliques, ils se taquinent et se pourchassent. Tous les deux ont perdu leur autorité interne pour se mettre au service de l’homme, le chien manifestement plus que le chat, qui peut encore se séparer d’un humain pour en chercher un autre ou, éventuellement, vivre seul, mais jamais loin d’un approvisionnement de nourriture.

Rares sont les chats qui quittent le fauteuil pour s’en aller vivre seuls au milieu des bois ; nombreux sont les chats qui quittent les bois pour vivre dans l’habitat humain.

Le chat est pulsion, autonomie et spontanéité là où le chien a besoin qu’on lui dise quoi faire et qu’on lui donne une direction dans la vie. Le chat, apparemment méditatif, est spontané, le chien est méthodique. Le chat mime la liberté et l’autonomie, le chien mime la serviabilité et la dépendance. Le chat réagit contre l’autorité, le chien se soumet à l’autorité.

 

Le chien et le chat sont bien les miroirs en contretype l’un de l’autre.

Joel DEHASSE